jeudi 28 août 2008

Chapitre 3 - Partie 1

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Chapitre 3 : Le départ
Partie 1


Encore sous le choc de la guérison miraculeuse, les deux jeunes gens se regardèrent encore quelques fractances avant de reprendre leurs esprits.
- Qu’est-ce que c’est que ça encore ! T’as d’autres surprises comme ça à me faire ?
- Je ne comprends pas plus que toi, je t’assure.
- Ouais, tu m’as l’air bien paumé toi aussi. C’est bizarre tout ça. J’avais jamais vu un truc pareil.
- Hum…

Serge était replongé dans ses pensées. Quel était encore ce nouveau phénomène qui venait de se produire ? S’il n’avait pas déjà eu plusieurs fois la preuve du contraire, il parierait sur la théorie du rêve. Mais tout était trop réel, malgré toutes ces choses impossibles qui s’étaient déroulées. Même lorsque ses songes le mettaient face à la dure réalité de son frère mourant, la profondeur des sentiments qu’il ressentait n’était pas si intense. La douleur qui l’avait cloué au sol, la peur lorsque ces monstres l’avaient poursuivi, le regain de confiance qui lui avait permis de se relever pour aller aider la jeune fille qui se tenait maintenant debout à ses côtés. Il n’avait pas pu inventer tout cela. Et même s’il avait pu imaginer les faits, jamais il n’aurait pu reproduire ces sensations aussi fidèlement. Cependant, quelque chose d’autre le perturbait. Malgré toutes les questions qu’il se posait, il n’était pas totalement dérouté par ce qu’il lui arrivait. Une impression de déjà vu, comme si une situation semblable s'était déjà produite. Et en fin de compte, l’incompréhension était mêlée à cette étrange certitude que tout ceci n’était pas si anormal. C’est cela qui l’empêchait de paniquer et de perdre son sang froid, ce qui ne retirait pas de sa tête toutes ces interrogations qui n’avaient de cesse de le hanter.

- Hey, regarde, les gens sortent !

En effet, un peu partout autour de la place, les portes s’ouvraient et laissaient apparaître les habitants d’Altéa. Sur le visage des personnes les plus proches, ils pouvaient lire la surprise ou le soulagement. Pourquoi tout le monde était resté enfermé tout ce temps ? Etaient-ils restés chez eux pour se protéger des loups ? En y songeant à nouveau, Serge se rappela des cris qu’il avait entendus avant de sortir dehors. Ceux-ci s’étaient peu à peu atténués. Tout le monde avait dû fuir pour se mettre à l’abri. Mais il était tout de même surprenant que la milice, même si elle n’était probablement pas équipée pour répondre à ce genre d’attaque, ne soit pas intervenue. Altéa était une cité prospère et même si le vol n’était pas enraillé, il était rare qu’un crime plus grave qu’un chapardage soit commis. Les armes que les miliciens portaient à leur ceinture se résumaient à un bâton paralysant ainsi qu’un propulseur chargé de fléchettes sédatives. Les seuls outils meurtriers étaient détenus par les chasseurs et ne servaient qu’aux battues régulières dans la forêt de Mirkwood. Mais aucun d’entre eux ne s’était montré pour défendre la ville. Peut-être avaient-ils protégé le quartier sud-est, là où leur matériel était entreposé.

Maintenant que les habitants se retrouvaient dehors, les discussions commençaient à s’élever et à remplir les lieux d’une inhabituelle agitation qui contrastait fortement avec le silence de mort qui régnait peu de temps auparavant. Les uns sortaient en courant, se précipitant chez leurs voisins pour prendre des nouvelles, les autres se rassemblaient pour débuter un débat animé dont il était impossible d’en saisir la moindre bribe tellement les mots se mélangeaient les uns aux autres. Non loin des deux jeunes gens, un homme faisait pivoter la porte de sa maison sur ses gondsavant de s’attarder sur l’observation de ceux-ci. Ce fut Christy qui reprit la parole en premier.
- Heu… je crois qu’il est temps que tu m’invites chez toi. C’est pas pour dire, mais j’en ai vu quelques uns qui te regardaient bizarrement. Je crois que ce ne serait pas une mauvaise idée que tu ailles te changer. Sans compter que j’ai pas trop l’habitude de traîner avec des gars en pyjama. Alors, on y va ?

Lui répondant d’un signe de la tête, Serge prit la direction du quartier résidentiel d’un pas assuré. Essayant de prêter un minimum d'attention aux regards qui le dévisageaient, il prit la direction de sa maison. Il n’en avait pas pris conscience jusqu’à présent, mais il était maintenant très gêné de se trouver dehors dans un tel accoutrement, d’autant que les rues étaient désormais remplies de monde. Les quelques mots réussissant à parvenir jusqu’à ses oreilles le renseignèrent sur la raison pour laquelle il n’avait croisé personne dans Altéa durant l’attaque des loups. Apparemment, il leur était tout simplement impossible d’ouvrir leur porte de l’intérieur, comme si une force mystérieuse les en empêchait. Tout ceci n’avait aucun sens mais cela ne préoccupait pas le jeune homme outre mesure. Il avait bien d’autres préoccupations pour le moment, sans oublier Christy qui n’arrêtait pas de le questionner.
- Bon, allez, dis-moi, je ne t’ai jamais vu à la fac, tu es étudiant ?
- Oui.
- En quoi ?
- Science.
- D’accord, c’est pour ça. Moi je suis en géo. C’est vrai que les deux bâtiments ne sont pas à côté. Et ça te plaît ? C’est quoi ton option ?
- Spécialité flux, second centycle.
- Ah oui ? Moi c’est mon premier centycle. Je viens d’arriver ici, c’est vraiment génial comme ville ! Franchement, le campus est extra, c’est dommage que tu n’y sois pas. En même temps, t’as de la chance, tu peux rester avec tes parents. Moi, je ne vais plus les voir très souvent, c’est pas évident de retourner à Arates. Et surtout, c’est pas donné !
- Mouais, si tu le dis.
- Ok, ok, je vois que je te saoule, j’ai compris. Tu me diras quand tu seras de meilleure humeur.
- Désolé, c’est juste que… je pense à d’autres trucs.
- Oui, oui, c’est ça. Enfin, ça change rien, on peut pas discuter avec toi. Mais c’est bon, t’inquiète, je me tais, pyja-gars.
Ne sachant que répondre et n’ayant pas trop envie d’envenimer la conversation, Serge se tut et fut imité par la jeune fille.

Alors qu’ils avançaient sans perdre de temps, ils remarquèrent un rassemblement très important dans l’une des ruelles. Les voix s’élevaient et la masse de badauds s’agrandissait sans cesse. Intrigué, le garçon s’approcha mais Christy le retint par la manche.
- Pas la peine d’aller voir, je sais ce que c’est. Je suis passée par là ce matin et, comment dire… je suis arrivée trop tard. Une femme, la gorge ouverte par une de ces bestioles…
- Tu veux dire qu’elle est morte ?
- Oui…
Le sourire narquois de la jeune fille avait fait place à un visage triste, affecté par les mots qu’elle venait de prononcer. Serge ne voulait pas la gêner et détourna son regard de peur de voir des larmes couler sur ses joues. Peut-être n’avait elle pas subi un choc suffisamment important pour la faire pleurer, mais il ne la connaissait pas et son brusque changement d’attitude prouvait que la scène à laquelle elle avait assistée l’avait troublée. Il décida de prendre une autre route afin d’éviter l’attroupement qui de toute façon bouchait complètement le passage.

A peine eut-il fait un pas dans la direction opposée que des voix se détachant du tumulte de la foule retint son attention.
- C’est encore une de ces horreurs, il ne faut pas la laisser partir !
- Comment osez-vous dire ça ? Elle n’a rien de terrifiant ! Ne lui faites pas de mal !
Le garçon s’arrêta net et se tourna vers Christy.
- On dirait que tu t’es trompé, ils n’ont pas l’air de s’intéresser à… enfin je veux dire, on ferait mieux d’aller voir.

Serge lui prit la main et l’entraîna avec lui vers le groupe d’Altéans. Il ne savait pas vraiment ce qui l’avait poussé à se précipiter comme il venait de le faire, à part la curiosité attisée par les paroles qu’il avait captées. Et puis il était persuadé que ce qui se cachait derrière la foule avait un lien avec tout ce qui se passait et pourrait peut-être lui apporter les réponses qu’il cherchait.
- Eh, qu’est-ce que tu fais ? lança Christy, surprise par la soudaine vitalité de son acolyte.
- Tu n’as pas entendu ? Il y a quelque chose ou quelqu’un derrière tous ces gens. Il faut aller voir, ça a certainement un lien avec ce qu’il nous arrive. Allez, dépêche-toi, suis-moi !

Bousculant tous ceux qui se trouvaient sur son passage, le garçon se fraya un chemin au milieu de cette masse grouillante. Ignorant les remontrances, il guida la jeune fille qui se confondait en excuses auprès de tous ceux qu’elle percutait un peu violemment. L’avancée lui parut interminable tellement son impatience le dévorait. Puis soudain, il perça le rempart de corps et se retrouva à l’air libre, au premier rang de la foule agitée. Devant lui, assise contre le mur d’une maison, se tenait une dame affolée. Mais rapidement, Serge comprit ce qui avait ameuté tous ces gens. La personne qu’il avait d’abord prise pour une femme n’était visiblement pas humaine.

dimanche 24 août 2008

Chapitre 2 - Partie 5

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Chapitre 2 : Christy
Partie 5


Un combat acharné dans le fond de ses entrailles. Une brûlure intense luttant contre l’intrusion d’une substance étrangère et glacée dans son être. L’impression de perdre tous ses organes, calcinés par un feu dévastateur, puis de les retrouver, comme revivifiés par l’eau d’une source bénie. Un claquement sur son visage. Une caresse à côté de la torture qu’il endurait dans les profondeurs de sa pauvre carcasse humaine. Le sang bouillonnant, se dilatant jusqu’à faire gonfler ses artères. Les muscles crispés, tendus, figeant son corps meurtri qu’il aurait de toute façon été incapable de contrôler. Aucune pensée ne traversait son esprit, seule la douleur existait en cet instant. Une douleur sadique qui s’amusait au plus profond de lui, lui étreignant les boyaux, puis les délaissant afin de s’en prendre à ses poumons ou à son cœur.

Mais peu à peu, sans même qu’il ne s’en rende vraiment compte, la souffrance s’atténuait et tout semblait reprendre sa place. Et puis vint la désagréable impression d’avoir subi une greffe que son organisme avait d’abord voulu rejeter à tout prix avant de se décider à l’accepter. Ou peut-être serait-il plus exact de penser qu’il s’y était résigné. Un autre coup sur la joue, plus net cette fois-ci, plus distinct. Le feu faiblissait, de plus en plus docile. Le sang reprit sa circulation, les muscles se relâchèrent. Les idées pouvaient à nouveaux résonner dans son crâne. Cela en devenait presque plaisant. Quelque chose de nouveau coulait en lui, de différent. Impossible de dire ce que c’était, mais lorsque la dernière flamme fut éteinte, tout son corps était apaisé. Un bien-être salvateur le parcourait, comme une gorgée de boisson fraîche qui s’engouffrait dans son gosier en récompense d'un effort colossal. Serge se complaisait dans cette agréable sensation lorsqu’un violent coup au dessus de la mâchoire lui projeta la tête sur le côté.

- Tu vas te réveiller bon sang, allez, c’est fini la sieste, tu ne vas pas t’évanouir après avoir affronté trois petites bestioles de rien du tout. Non mais c’est pas vrai ça, tu vas te bouger oui !

Une voix hystérique lui parvenait jusqu’aux oreilles, de plus en plus forte, de plus en plus précise.
- Ah, bah quand même, il était temps !
Le garçon venait d’ouvrir un œil et reconnut sans mal la fille qui l’avait aidé à terrasser les trois loups. Décollant sa joue des pavés, il ouvrit son deuxième œil pour la regarder en face.
- Aïe !
Il venait de se prendre une autre gifle, le renvoyant saluer les dalles de la place.
- Pourquoi avez-vous fait ça ?
- Oh, désolé, je voulais juste m’assurer que tu étais bien réveillé. En même temps, tu es bien habillé pour dormir ! Un peu ridicule par contre, il faudra songer à changer de fournisseur. Les rayures c’est classique, mais pas super sexy.

Interpelé par ces propos, le garçon releva la tête pour s’apercevoir qu’il était de nouveau vêtu de son pyjama et qu’il ne restait aucune trace de son surprenant équipement. Plus d’armure, de gantelets, pas même une trace de la longue épée dont il venait de se servir. Avait-il encore rêvé ? Il fronça les sourcils, cherchant une quelconque explication à tout ceci. Il détailla alors les vêtements de la jeune fille. Assise par terre à ses côtés, les jambes repliées sous son corps, elle portait un short de sport qui lui arrivait à peine au dessus des genoux. Il s’amusa à remarquer que de chaque côté de ses cuisses étaient tracées deux rayures rouges sur le tissu blanc. "Ouais, pas très sexy !" rit-il intérieurement sans oser faire la moindre réflexion à haute voix. Elle était penchée sur lui et un T-shirt beaucoup trop grand pour elle lui recouvrait le torse. Elle l’avait cependant noué à l’avant afin de laisser apparaître son nombril. Ses longs cheveux étaient attachés en un chignon rapide mais une petite mèche blonde lui tombait devant les yeux. Celle-ci n’était probablement pas voulue mais elle ajoutait un charme certain au visage de la jeune fille.

- Bon, allez, tu ne vas pas rester allongé éternellement !
Elle se redressa et lui tendit sa main droite pour l’aider à se relever. Se faisant, elle arbora un large sourire qui semblait déplacé comparé au peu de compassion qu’elle exprimait dans ses propos. Cependant, Serge accepta son aide et se remis sur pieds.
- Eh bien dis moi, quelle histoire ! Tu sais ce que c’était que ces bestioles enragées ?
- Euh… Non.
- D’accord, c’est bien ce que je pensais, tu ne sers vraiment à rien. Enfin, on va faire avec. Je me demandais… Je pensais être folle, mais avec tout ce qui se passe… c’est bien toi que j’ai vu dans la grotte ?

Il n’avait donc pas rêvé. Rien de tout ceci n’était un rêve. A moins qu’il ne soit toujours pas réveillé. Mais tout semblait trop réel. Il l’avait reconnu et elle aussi.

- Oui, je crois... Je vous ai vu en tout cas.
- Tu me diras, avec des fringues comme ça, je ne pouvais pas me tromper ! N’empêche, c’est bizarre tout ça. Je me demande d’où elles sortent ces horreurs. T’avais déjà vu un truc pareil ? Et puis cet arc qui m’est apparu entre les mains. Le plus étrange c’est que je n’en ai jamais touché de ma vie et là, il m’en surgit un de nulle part et je m’en sers comme une pro. Non mais c’est vrai ! J’ai tué je ne sais pas combien de ces machins sans même m’en rendre compte. C’est dingue, je t’assure ! Oh, tu m’écoutes ?
- Hum… oui, oui, pardon. Je me disais juste que c’était pareil pour moi.
- Tu te moques de moi, t’étais en train de fuir comme un lapin quand je t’ai vu ! Franchement, tu n’avais pas l’air de faire le fier dans ton costume !
- Heu… ouais, c’est vrai… je ne comprends rien à ce qu’il m’arrive. Je n’ai jamais tenu une épée de ma vie. Comment voulez-vous que je sache m’en servir ! Pourtant, quand je vous ai entendu crier, tout m’a semblé naturel, il m’a suffit de saisir cette épée et tout s’est fait tout seul.
- Ah bah finalement t’as une langue ! Ok, d’accord, je vois. Je ne comprends rien à tout ça et toi encore moins. Bon, on est mal barré on dirait.

La jeune fille scruta les alentours.

- Et il n’y a toujours personne ici, c’est dingue ! Bon, je sais bien que c’est encore tôt pour une prima, mais quand même ! Tu me diras, c’est peut-être mieux pour toi, tu ferais mieux de te changer avant que tout Altéa se moque de toi. Tu habites loin ?
- Euh, non, pas trop, à une quinzaine de nuances d’ici, mais vous…
- Oh, tu vas arrêter avec ce "vous", je ne vais pas le supporter longtemps. J’ai l’impression d’être une vieille dame décrépie quand tu me dis ça ! Je m’appelle Christy et c’est "tu" ou rien d’autre ! Attends, on doit avoir à peu près le même âge ! Franchement, tu m’as l’air bien coincé comme mec. Et toi, c’est quoi ton nom ? Hein ! Qu’est ce que tu regardes comme ça ?

En effet, Serge n’écoutait plus grand-chose de ce qu’elle disait et son regard était tourné vers la main gauche de son interlocuteur. La jeune fille, très expansive avec son bras droit, gardait le second près du corps. Une vilaine blessure saignait au niveau de son poignet.

- Qu’est-ce que vous…
- "TU" !
- Pardon. Qu’est-ce que tu as à ton poignet ?
- Oh, ça, ce n’est rien, t’occupe, juste une petite blessure.
- Ça ne vous, euh, te fait pas mal ?
- Non, c’est bon, t’inquiète. Je te signale que je me suis présentée, la moindre des choses serait que tu en fasses autant !
- Oh, euh, pardon, Christy, c’est ça ? Moi c’est Serge. Laisse-moi voir ça s’il te plait.
- Non mais ce n’est rien je te dis, c’est pas vrai, tu écoutes quand on te parle ? Et qu’est-ce que tu peux y faire toi, de toute façon ?
- Je ne sais pas, mais j’ai comme un pressentiment, quelque chose qui me pousse à regarder.

Le garçon tendit la main faisant signe à la blessée de lui donner la sienne. La mine soupçonneuse, elle accepta tout de même. Voyant la plaie de plus près, il fut surpris que cela ne lui fasse pas plus mal que ça. La chair était à vif sur plusieurs centimètres et les crocs avaient atteint les os du poignet qui se laissaient apercevoir derrière le sang qui avait commencé à sécher. Avec son autre paume, Serge recouvrit la plaie et ferma les yeux. Presqu’aussitôt, une lumière blanche rayonna à l’endroit précis où se trouvait la blessure et s’échappait entre les doigts du garçon. Quelques instants plus tard, les rayons disparurent et il retira sa main. Les deux jeunes gens fixaient le même endroit avec une surprise non dissimulée. La blessure s'était refermée. Aucune cicatrice n’était visible. Christy releva les yeux vers son guérisseur.

- Il va vraiment falloir qu’on discute tous les deux…

mercredi 20 août 2008

Chapitre 2 - Partie 4

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Chapitre 2 : Christy
Partie 4


Malgré la cinquantaine de mètres qui la séparait de sa cible, la jeune fille décocha une flèche d’une telle précision qu’elle vint transpercer le flan de l’un des trois loups alors que celui-ci venait de se ruer sur sa victime. L’animal retomba lourdement sur le corps immobile qu’il venait d’attaquer en vain. Mais cela n’avait pas arrêté les deux autres créatures qui avaient bondi en même temps que la première et qui s’évertuaient à griffer et lacérer l’armure légère qui se trouvait sous leurs pattes.

Alors que Christy se rapprochait de la scène, un nouveau trait encochée sur la corde tendue, elle vit celui qu’elle venait de toucher se relever. La distance qui les séparait avait rendu son coup bien moins précis et son attaque n’avait probablement pas atteint un point vital. La bête se dressait désormais face à elle. C’était bien la première fois qu’une de ces créatures résistait à l’un de ses assauts. Déstabilisée, elle pointa à nouveau son arc vers le loup et lâcha la corde. La pointe acérée fusa vers l’animal mais la précipitation de la jeune fille lui fit rater sa cible et la flèche vint se briser sur le pavé de la grande place. Profitant de ce moment pour riposter, le monstre se rua sur l’archère et parcouru les quelques mètres qui les séparaient en un instant. Dans un puissant grognement, la gueule se précipita en avant, les crocs découverts, prêts à se refermer sur le premier obstacle qui viendrait rencontrer sa trajectoire. Ce fut le poignet gauche de Christy, celui qui tenait la branche de l’arc, qui remplit cet office.


Un cri de douleur retentit et Serge ouvrit les yeux. A quelques centimètres de son visage brillait une flamme rouge au fond d’une orbite sombre et profonde. Une haleine chaude et humide atteignait ses pommettes protégées par le casque de bronze. Ses narines étaient quant à elles irritées par une odeur nauséabonde, une odeur de mort. Une grimace de dégoût déforma ses lèvres. La gueule fumante essayait de croquer le torse du garçon, mais le cuir qui le tapissait semblait résister et le protéger des dents ciselées et coupantes comme des couteaux. Un poids sur ses jambes révélait la présence d’un second prédateur derrière le premier, mais le troisième avait disparu.

Quel était donc ce cri ? Une voix de femme. Etait-elle en danger ? Détournant les yeux des créatures qui l’assaillaient, son regard se posa sur la lame qui reposait au sol, le long de sa jambe gauche, bien rangée au fond de son fourreau. A sa vue, une bouffée de confiance le parcourut et il se sentit prêt à agir. D’un revers du bras, il repoussa violemment la bête la plus proche qui laissa échapper un couinement en allant s’abattre sur le sol un ou deux mètres plus loin. Ramenant sa main à hauteur de sa hanche, il trouva la poignée de l’épée qui s’y trouvait. Il tira le pommeau vers lui, laissant glisser la lame sur la chappe provoquant ainsi un bruit métallique. Ce son fit redresser la tête du second loup qui s’acharnait sur sa jambière. Toujours à terre, Serge déplia son bras et abattit de toutes ses forces son arme sur la joue de l’animal qui s’effondra sous son poids. Le garçon se releva alors pour donner un second coup qui trancha en deux le corps du monstre. Sans un bruit, il se volatilisa pour disparaître totalement et laisser place à un nuage coloré qui s’éleva dans le ciel. Serge le suivit des yeux et le vit s’arrêter à quelques mètres du sol, restant en suspension dans l’air. Abandonnant cet étrange spectacle, il rabaissa la tête pour chercher la personne qui avait pu pousser le cri qui l’avait sorti de sa torpeur. Il ne mit pas bien longtemps pour la découvrir.

Face à lui, une jeune fille se débattait, essayant de repousser une de ces horreurs. A ses pieds reposait un long arc argenté qu’elle avait dû laisser tomber dans la bataille. A l’extrémité de sa main gantée, son poignet saignait abondamment et elle tentait désespérément de se protéger avec son deuxième bras valide. Sans même réfléchir plus longtemps, Serge se précipita vers elle pour lui venir en aide. Les semelles de ses chaussures claquant sur les pavés, il fila comme le vent, son corps penché en avant, la lame de son épée rabattue en arrière et la garde reposant contre son ventre. Profitant de toute l’allonge dont il disposait, il balaya l’espace devant lui du tranchant de son arme qui traversa le corps de la bête. Celle-ci disparut subitement pour laisser place au même phénomène qui s’était produit précédemment. Le flot coloré s’envola et rejoignit le premier qui surplombait toujours les lieux et les deux se mélangèrent dans un tourbillon. Mais ceci n’attira pas l’attention du garçon qui stoppa net sa course et s’arrêta à côté de la fille qu’il venait de secourir.

- Ca va, vous allez bien ?

Alors qu’il prononçait ses mots, Serge eut un mouvement de recul. Ça ne pouvait pas être elle ? Devant lui se trouvait la fille qu’il avait aperçu peu de temps avant dans la grotte. Elle était vêtue bien différemment, mais il n’y avait aucun doute, c’était bien son visage qu’il avait face à lui.

- Bien sûr que je vais bien, je n’avais pas besoin de toi, franchement, pour qui tu te prends, pour le sauveur de ces dames ! Sans moi, tu n’aurais pas fait long feu, crois-moi ! Oh, et puis qu’est-ce qu’il t’arrive, on dirait que tu as vu un fantôme. Allez, reprend-toi !

Complètement déstabilisé, Serge ne savait que répondre. L’avait-elle reconnu ? Avec son nouvel uniforme et les mots qui sortaient de sa bouche comme un fleuve sans fin, elle ne donnait plus du tout la même impression de douceur qui lui avait sauté aux yeux lorsqu’elle lui était apparu dans la caverne. Il cherchait encore une réponse lorsqu’elle se précipita au sol pour récupérer son arc. En une fractance, elle glissa une flèche entre ses doigts, tendit la corde et décocha un trait qui passa à quelques centimètres du garçon. Il ne vit pas directement sa destination finale, mais un jappement dans son dos lui fit comprendre qu’elle venait d’achever le dernier loup qui restait. Il se retourna juste à temps pour voir une troisième volute identique aux précédentes rejoindre les premières et se mêler à elles.

- Tu vois, je viens encore de te sauver la vie, à qui faut-il dire merci ? lâcha la jeune fille d’un ton narquois.

Mais Serge ne l’écoutait pas et son regard était tourné vers le ciel. La masse colorée qui s’était formée au dessus de leur tête s’agitait et se rapprochait d’eux. Puis, deux filaments s’extirpèrent du nuage pour se diriger, l’un vers l’archère, l’autre vers le garçon. Ces serpents de lumières ressemblaient en tout point à ce qu’il avait pu voir dans la grotte. Serge se tourna vers la fille qui semblait calme et sereine, comme si elle attendait sans aucune crainte que ce flux la rejoigne. Reportant son attention sur le flot qui descendait vers lui, il suivit l’exemple qui lui était donné et laissa cette étrange substance pénétrer en lui.


Le premier contact fut agréable, toujours aussi revigorant.

Le second effet ne se fit pas attendre. En un instant, une douleur atroce lui déchira l’abdomen et un cri strident résonna dans sa tête. Poussant un hurlement à s’en arracher les tympans, Serge se laissa tomber à genoux avant de perdre connaissance.

mercredi 13 août 2008

Chapitre 2 - Partie 3

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Chapitre 2 : Christy
Partie 3


Une voix mystérieuse, une caverne, des cristaux étincelants et une femme flottant dans les airs… Que lui était-il arrivé ? Et cette lumière qui avait serpenté devant elle jusqu’à pénétrer dans son corps. Que cela pouvait-il bien être ? De retour dans sa chambre d’étudiante, Christy était envahie par toutes ces questions, mais aucune d’entre elles ne trouvait de réponse. Et cette incomparable fraîcheur qui l’avait emplit à l’instant précis où ce filament multicolore avait touché sa poitrine. Cette force qui l’avait imprégnée toute entière et lui avait fait découvrir des sensations inconnues. Elle s’était sentie revivre, comme si un nouveau sang parcourait ses veines, purifié de toutes les impuretés qu’il avait pu accumuler. Son esprit aussi avait été bouleversé, toutes ses peurs avaient été exorcisées et elle se sentait prête à affronter tous les obstacles qui pourraient se dresser sur son chemin. Maintenant encore, de retour sur son lit, elle avait la nette impression de ne jamais avoir été si forte. Elle se leva et s’étira. Elle était dans une forme extraordinaire, la fatigue s’était totalement envolée et elle se surprit à penser qu’elle n’aurait aucun mal à faire le tour du campus en courant.

Lorsqu’elle récupéra sa pierrelle, elle s’aperçut que prima avait commencé et qu’il était encore tôt. Son premier cours du cycle était à dix lux et la sixième luxance venait à peine de débuter. Cependant, elle n’avait aucune envie de se recoucher et elle voulait profiter de la grande vitalité qui la parcourait. Elle glissa l’anneau sur lequel était serti sa pierrelle à son index et retira sa chemise de paluance pour aller prendre une douche. L’eau fraiche qui perlait sur sa peau n’avait jamais été si bienfaisante alors que d’habitude, elle ne la supportait pas et se douchait à l’eau chaude. Une fois sortie, elle enfila un short et un large T-shirt. Elle voulu avaler quelque chose pour son petit déjeuner, mais elle se rendit compte qu’elle n’avait pas faim. Elle fit donc une croix sur le café et les tartines pour descendre les marches de la résidence à petite foulée.

Au pied du bâtiment, elle ne regretta pas de s’être habillée si léger. Le flux circulant dans les environs était condensé ce qui réchauffait agréablement l’atmosphère. C’était bien la première fois qu’elle courait dans l’herbe verte du quartier universitaire. Habituellement, elle n’était pas très sportive et se levait rarement aussi tôt si rien ne l’y obligeait. Comme elle s’y attendait, elle se dépensa durant toute une luxance sans avoir la moindre envie de s’arrêter. Au contraire, elle appréciait tout particulièrement la sensation de ses muscles qui se contractaient et la propulsaient vers l’avant. La sueur qui lui coulait sur tout le corps lui donnait une certaine satisfaction. Peu importe d’où lui venait cette énergie, Christy ne pouvait que l’apprécier.

Sa course l’avait amenée à proximité du quartier résidentiel et au fur et à mesure qu’elle s’en approchait, une rumeur grandissait. Quelle était donc cette agitation ? Elle s’approcha des premières maisons et les bruits qu’elle entendait ressemblaient de plus en plus à des cris de terreur. Au loin, une silhouette traversa la rue, suivie de près par un animal à quatre pattes. Etait-ce un chien ? En tout cas, il ne semblait pas vouloir du bien à cette personne qu’il poursuivait. Sans aucune hésitation, la jeune fille reprit sa course dans leur direction.

Arrivée à l’intersection où la bête avait disparu, Christy tourna à gauche et découvrit une scène atroce. A quelques mètres d’elle se trouvait un grand loup brun aux poils longs et hérissés. Sous ses pattes, une grande ombre immobile se faisait dévorer. La gueule du monstre s’abattait sans discernement sur ce qu’il restait du visage d’une femme d’une quarantaine de centycles. Les crocs arrachaient des bouts de chair qui retombaient au sol, se vidant de leur sang lorsqu’ils n’étaient pas directement avalés par la bête. Dans son appétit débordant, l’animal laissa sa mâchoire déchiqueter le bras que la femme avait dû placer devant ses yeux pour les protéger de la créature. Mais cela ne l’avait pas arrêtée et la gorge béante de la dame témoignait de la façon dont elle avait été achevée.

- Lâche-la !

La colère avait envahi Christy et elle n’avait pas pu retenir ses mots. Le loup redressa la tête et la tourna vers la jeune fille, la dévisageant de ses deux rubis étincelants. Abandonnant son repas, il lui fit alors face, retroussant ses babines pour faire apparaître ses crocs dégoulinants d’une bave épaisse, qui tombait lourdement sur les pavés de la rue. Et laissant derrière lui le cadavre de sa précédente proie, il se précipita vers la jeune fille.

A aucun moment la peur ne prit le dessus dans l’esprit de l’étudiante. Bravant l’attaque de la bête, elle se laissa aller à cette nouvelle sensation qui l’habitait. Des rayons de lumière parcoururent son corps la cachant aux yeux de tous durant une fractance. Lorsqu’elle réapparut ses vêtements avaient laissé place à une chemise de coton verte qui apparaissait sous une longue veste de cuir. Son short était remplacé par un long pantalon marron recouvert par des bottes souples mais résistantes. Autour de sa tête était noué un bandeau vert qui empêchait ses cheveux de glisser devant ses yeux. Des gants de cuir lui protégeaient les mains dans lesquelles elle tenait un arc d’argent. Dans son dos était accroché un grand carquois.

D’un mouvement élégant et maîtrisé, la jeune fille y plongea sa main et en ressorti une flèche qu’elle déposa sur son arc. La corde claqua et le trait trancha l’air avant de se loger dans la gorge du loup prêt à bondir. Dans un couinement, l’animal roula à terre pour s’arrêter au pied de son bourreau. Dans un souffle, son corps immobile se volatilisa, laissant place à une volute colorée dansant dans l’air. Presque instantanément, elle se précipita dans le corps de Christy qui ressentie à nouveau cette étrange sensation de fraîcheur, nettement moins prononcée cette fois-ci.

Sans même se poser de question sur ce qu’il lui était arrivé, la jeune fille, dans ses habits d’archère, s’élança à nouveau dans les rues, suivant les hurlements affolés des habitants. Décochant ses flèches avec une précision déconcertante, elle élimina un à un les monstres qui semaient la terreur dans les rues d’Altéa. Aucun de ceux qu’elle rencontra ne lui résista. C’est alors qu’elle vit s’enfuir un étrange individu vêtu d’une armure de cuir, une épée accrochée à la ceinture. Trois de ces horreurs qu’elle avait décimé en grand nombre étaient à ses trousses. Elle les poursuivit, mais ils avaient déjà une grande longueur d’avance. Lorsqu’elle arriva sur la grande place, l’homme était à terre et les bêtes s’apprêtaient à bondir.

lundi 11 août 2008

Chapitre 2 - Partie 2

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Chapitre 2 : Christy
Partie 2


La fraicheur de la pièce témoignait du peu de vie qui circulait dans la chambre. Le jeune frère était allongé sur son grand lit blanc, immobile depuis maintenant trois cycles. Son corps était vidé de toute chaleur humaine et sa peau d’une blancheur presque cadavérique. Tout en lui rappelait l’aspect d’un mort dont le flux l’avait quitté pour retourner à la planète. Mais il ne l’était pas. Ses muscles, toujours contractés, en témoignaient et son visage figé par la douleur montrait qu’il n’avait pas atteint le repos éternel. C’est du moins ce que s’évertuait à penser Serge, toujours à genoux, serrant la main inerte de celui qui l’avait toujours fait rire, le seul être qu’il avait vraiment aimé.

Bien sûr, ses parents étaient là pour lui, mais les joies qu’il avait partagées avec Xavier étaient incomparables. Jamais il n’oublierait les longues soirées à discuter avec lui de ses problèmes à l’école, de tous ces idiots qui ne le laissaient jamais tranquille, qui le chahutaient sans arrêt. Toujours, le jeune frère l’écoutait, le rassurait. Il ne pouvait plus compter le nombre de fois où l’un de ces gamins s’était jeté sur lui, lui dérobant son livre et le jetant dans la poussière de la cour du lycée. Arrivé à la fac, tout cela s’était calmé, ses soucis avaient disparu, mais il ne s’était jamais mêlé aux autres, restant toujours seul, préférant sortir son magazine de science que de parler à tous ces gens qui ne l’avaient jamais compris. Son seul ami était son frère, lui bien plus social, bien moins studieux aussi, mais probablement plus heureux. Il ferait tout pour lui, l’aiderait dans toutes les galères. Mais là, que pouvait-il faire ? Rien dans tous ses bouquins ne lui avait donné la moindre piste sur la maladie qui le rongeait. Même les plus grands médecins n’avaient rien trouvé, alors lui, que pouvait-il faire ? Il ne lui restait plus qu’à attendre, attendre que quelque chose change… Soudain, le silence fut rompu.


Dehors, des cris s’élevèrent. Serge redressa la tête. Avait-il bien entendu ? Qu’est-ce que cela pouvait bien vouloir dire ? Un nouveau cri, puis un autre. La population semblait s’agiter à l’extérieur. Le garçon se releva, fit quelques pas vers la fenêtre et se pencha pour voir ce qui pouvait affoler à ce point les habitants. Scrutant les environs, il vit deux silhouettes disparaître à l’angle de la rue, probablement une femme suivie par son chien. Maintenant, les cris ne cessaient plus et bien plus que de l’agitation, c’était la panique qui avait pris place dans la ville.

- Je reviens frérot, je vais voir ce qu’il se passe.

Dévalant les escaliers, Serge traversa le salon pour atteindre la porte d’entrée. Toujours vêtu de son pyjama vert à rayure, il entrouvrit le battant et glissa la tête à l’extérieur. Ici, la rue semblait calme, personne aux alentours, les cris ne résonnaient qu’au lointain. Intrigué, il s’avança un peu plus jusqu’à se trouver entièrement dehors. Un souffle violent lui parcouru l’échine au moment où la porte se referma avec fracas.

Dans son dos, un grognement sourd signala la présence d’un intrus. Se retournant précipitamment, le garçon vit à quelques centimètres de lui un grand loup à la fourrure épaisse, les babines retroussées laissant apparaître de longs crocs acérés. Ses poils bruns se dressaient sur son dos dans une posture agressive. Mais était-ce vraiment un loup ? De chaque côté de son museau, à la place des yeux, brillaient deux grandes billes rouges au fond de leurs orbites. L’animal se tenait prêt à bondir sur sa proie. Serge posa la main sur la poignée, espérant pouvoir se mettre hors de portée de son assaillant.

Les pattes arrière se fléchirent, les muscles se contractèrent…
Le corps puissant et allongé s’élança...
D’un geste, le jeune homme se protégea le visage de la gueule béante prête à se refermer sur sa gorge…

Une lumière éblouissante…
Les crocs volèrent en éclats…

A la place de la chair tendre du poignet du garçon, la mâchoire avait rencontré une surface dure, lisse et froide. L’animal retomba à terre et recula. Sa longue queue menaçante se rabaissa. Remplaçant la faible victime qu’il venait d’attaquer, un individu vêtu d’une armure de cuir matelassée se tenait dans la même position. Des gantelets de fer étincelants lui recouvraient les mains et les avant-bras tandis que des lanières de peau lui protégeaient les mollets. Prolongeant la garde et le pommeau qu’il tenait dans la main, une longue lame parfaitement aiguisée brillait d’une lueur argentée. Lorsque les bras crispés se relâchèrent et retombèrent le long du corps de cet étrange personnage, le visage d’un jeune garçon apparut derrière un casque de bronze. L’air affolé, c’était les traits de Serge qui se dessinaient.


Reprenant ses esprits, il détailla son nouvel accoutrement. "Mais qu’est-ce que c’est que ça ?" pensa-t-il. Le loup avait déjà détalé quand le garçon observa attentivement l’épée qu’il tenait à la main. Combien pouvait-elle peser ? Il lui était impossible de répondre à cette question. Malgré le métal lourd qui la constituait, il ne ressentait pas son poids. Et cette armure ? De même, il ne la sentait même pas sur ses épaules. Tout ceci n’avait aucun sens. Mais il n’eut pas le temps de se poser d’autres questions. De l’endroit où la bête avait disparu venait de surgir trois autres de ses congénères et ils ne semblaient pas impressionnés par les nouveaux habits du garçon. Dévalant la rue à une vitesse incroyable, les six lueurs rouges se rapprochaient dangereusement. Dans un geste presque naturel, il rangea son arme dans son fourreau et prit la fuite.

Entendant à nouveau les cris des habitants déroutés, il courut dans leur direction. N’osant pas se retourner, il n’avait aucune idée de la distance à laquelle pouvaient se trouver ses poursuivants. Les maisons qu’il croisait étaient de plus en plus luxueuses, ce qui signifiait qu’il se rapprochait à grand pas de la place centrale.

A bout de souffle, il débarqua dans le centre de la ville, véritable clairière au milieu de cette forêt urbaine. Le ciel était rouge et la première fluance, prima, avait commencé. Comme au début de chaque cycle, la place était déserte car c’était la fluance de repos pour les commerçants. Il ne s’en était pas rendu compte jusqu’à présent, mais les cris avaient cessé et il ne voyait personne. Derrière lui, il sentit le danger ressurgir en entendant des grognements violents. Il se retourna juste à temps pour voir trois ombres se jeter sur lui. Il bascula et se retrouva à terre, entouré par les bêtes qui le poursuivaient quelques instants auparavant. Lorsqu’elles s’élancèrent à nouveau vers lui, c’est le sourire de son frère qui emplit ses pensées.

vendredi 8 août 2008

Chapitre 2 - Partie 1

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Chapitre 2 : Christy
Partie 1

Altéa est divisée en divers quartiers, chacun ayant sa propre particularité. Vue du ciel, la ville prend la forme d’un grand pavé zébré par les innombrables rues qui le traverse. Quatre tours émergent au milieu de chacune des faces de ce rectangle citadin. Celles-ci ne sont pas habitées. Peut-être avaient-elles une quelconque utilité par le passé, mais rien n’a jamais été retrouvé à ce sujet. C’est autour d’elles que se sont constitués les quatre principaux quartiers. Deux grandes avenues coupent Altéa, délimitant ainsi les différents secteurs. La première relie la tour nord à celle se trouvant au sud tandis que la seconde part de l’est pour rejoindre la tour ouest. A l’intersection de ces deux routes principales se trouve la place centrale. C’est sur celle-ci qu’à lieu le marché, présent cinq fluances sur six et ouvert de la sixième luxance jusqu’à la seizième.

Au nord, la cité est surplombée par les Cintares, une gigantesque chaine montagneuse qui se dresse comme un mur bloquant tout accès à la mer du nord. L’aspect le plus surprenant de cette région est d’ailleurs la présence de ces montagnes qui s’élèvent brutalement à une altitude vertigineuse, naissant en plein milieu de la plaine sur laquelle s’est construite Altéa. Cette roche à l’allure agressive est cependant très tendre et parcourue d’abondant gisement d’ilidium, ce qui est à l’origine de la richesse de la cité. Au pied des premiers pics abrupts, dans l’espace séparant la ville des Cintares, les minéraux extraits sont traités et transformés en gils. Ceux-ci sont alors transportés par aéroporteur dans tout Ivalice, en remplacement des anciennes pièces qui sont alors recyclées et servent alors de matériaux de construction. En effet, l’ilidium acquiert des qualités d’isolant thermique et devient très dur en vieillissant. Il sert alors à la fabrication de nombreux véhicules et matériels soumis à de forte température. Il est également incorporé sous forme de microparticules aux fibres des vêtements de haute qualité.

Encerclant Altéa d’est en ouest, la forêt de Mirkwood est paisible et prospère. La géographie de la région ne laissant que peu de place à l’élevage et à l’agriculture, c’est dans cette épaisse forêt que les habitants trouvent leur nourriture. Mais en réalité, cela ne suffit pas à nourrir la ville entière et une grande variété d’aliments est importée du monde entier. C’est dans le quartier sud-est que les baies et les animaux chassés sont stockés puis préparés afin d’être vendus sur la place centrale. C’est aussi dans cette zone que se situe l’aéroport de livraison chargé de recevoir la marchandise des autres villes et continents.

Le quartier résidentiel est principalement concentré dans la partie sud-ouest d’Altéa, même si les habitations s’éparpillent également dans les trois autres quartiers. Les plus riches se rassemblent près de la place centrale et ont ainsi un accès plus rapide aux différents secteurs de la ville. Les plus pauvres sont quand à eux amassés sur la périphérie, aux abords de la forêt.

Le quartier des affaires et des sciences prend quand à lui place dans la zone nord-est. C’est ici que l’on retrouve tous les centres de recherche et de développement ainsi que les industries technologiques. Grâce à sa forte concentration en étudiants, Altéa fait partie des plus importants pôles scientifiques de tout Ivalice en formant elle-même ses futurs ingénieur-chercheurs. L’innovation est à la base du programme de la cité et si elle ne possède pas elle-même une grande capacité de production, elle propose fréquemment de nouvelles idées qui sont ensuite exploitées dans le monde entier.

Enfin, le quartier universitaire se trouve au nord-ouest et propose aux étudiants tous les cursus possibles. La faculté des sciences s’étend à l’est de cette zone pour être en étroite relation avec le quartier des affaires. Une grande quantité des élèves de cette fac poursuivent leur carrière à Altéa. Ici est étudié la mécanique, les matériaux, la physique, la chimie et bien d’autres domaines scientifiques. C’est bien entendu ici que les cours de flux sont dispensés. Même si les sciences technologiques sont la grande fierté de la ville, les autres facultés comme celles de psychologie et de médecine sont également réputées pour leur qualité d’enseignement. Un campus gigantesque permet d’accueillir les étudiants dans ce quartier. C’est ici, loin de ses parents et de sa famille, que Christy résidait.


Sortant de son cours de géographie dédié au grand lac de Faltares et à ses ressources, Christy fut rejoint par un jeune homme brun, un peu plus grand qu’elle. A sa carrure, il semblait être un garçon sportif et qui faisait attention à son allure. Habillé de façon décontracté, il s’approcha d’elle, la prit dans ses bras et lui donna un long baiser. Après quelques fractances, il la lâcha et la fixa dans les yeux.
- Je t’invite au cinéma ce soir, il y a une séance à 17 lux !
- Hum… Non, pas ce soir, je crois que je vais rentrer et me coucher tôt.
Sans plus d’explications, elle le laissa là et quitta le bâtiment. Non, décidément, elle n’avait aucune envie de sortir ce soir. D’ailleurs, elle allait probablement bientôt le quitter. Elle avait été très bien avec lui, mais il lui fallait autre chose. Un peu de nouveauté.

Parcourant le campus verdoyant, elle se dirigea directement vers sa chambre d’étudiante. Montant deux à deux les marches qui la conduisaient au deuxième étage, elle sortit son trousseau pour ne pas perdre de temps. Arrivée devant la porte, elle fit jouer ses clefs dans la serrure, ouvrit la porte et la referma derrière elle en rabattant le loquet. Elle posa son sac au pied du bureau et commença à se déshabiller. "Pourquoi suis-je si fatiguée" pensa-t-elle tout en enfilant sa chemise de paluance bleutée. Elle ferma les volets de son vingt mètres carrés, s’allongea sur son lit et s’endormit aussitôt. Au beau milieu de son sommeil, une voix s’éleva.

- Rejoins-moi Atalette…

mardi 5 août 2008

Chapitre 1 - Partie 5

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Chapitre 1 : La femme au Cristal
Partie 5


Les fibres de lumières se rassemblèrent et s’étirèrent pour s’agencer en une longue forme verticale. Ils commencèrent à se condenser pour donner naissance à une matière volatile plus compacte. Un grand voile blanc flottait désormais au centre de la pièce comme porté par un vent si léger qu’il ne pourrait même pas soulever une plume. Sous ce voile se dessinait peu à peu une silhouette humaine. Le visage calme et apaisant d’une femme se révéla alors aux yeux ébahis qui se tournaient vers elle. Ses longs cheveux d’une pâleur éclatante se laissaient porter par le doux souffle qui l’entourait, souffle qu’aucun des membres présents dans la grotte ne pouvait sentir. En réalité, il était difficile de donner un âge à cette grande dame blanche tant sa peau était parfaite, ne laissant apparaître aucune ride, ne serait-ce aux coins des yeux. Tout son corps rayonnait de la même lumière blanche, flottant à un mètre du sol. Elle pivotait progressivement sur elle-même, faisant tour à tour face à chacun de ses invités. Ses deux bras étaient rassemblés devant elle, et lorsqu’elle se tourna vers Serge, celui-ci pu voir le cristal qu’elle tenait entre ses mains.

Sa surface était taillée de nombreuses facettes, lui donnant un certain éclat, mais il paraissait bien fade à côté de sa porteuse. Bien différent des cristaux de flux, celui-ci était transparent et sans aucune couleur. Sa base avait la forme d’une demi-sphère ce qui lui permettait d’être aisément tenu entre deux mains, comme l’on porterait un bol. Autour de la face supérieure, cinq longs appendices dépassaient, comme s’il s’agissait de plusieurs cristaux encastrés, chacun pointant dans une direction différente. Ils étaient disposés de façon à former un pentagone dont les sommets étaient régulièrement espacés, rappelant ainsi la disposition des cinq cristaux qui dépassaient du sol.

- Qui êtes-vous, que me voulez-vous ?

C’était une voix d’homme qui venait de s’élever dans la pièce. Une voix vive et claire que Serge attribua au premier jeune garçon qui l’avait rejoint. Le ton qu’il avait employé laissait entendre une certaine violence mêlée à de l’agacement qui était totalement compréhensible dans une telle situation. Cependant, Serge fut surpris que le garçon ose élever la voix face à cette étrange inconnue. Lui n’aurait jamais eu le courage de prononcer un mot tellement l’apparition de cette femme l’impressionnait. Pour une raison qu’il ne s’expliquait pas, il se sentait toujours en sécurité mais démuni de tous ses moyens. Quelques fractances plus tard – une nuance étant divisée en cent fractances – la réponse résonna dans le silence de la grotte.

- Comme je l’ai déjà dit à chacun de vous, mon nom est Lucrécia et vous êtes mes enfants, même s’il vous est impossible de vous en souvenir pour le moment. Il y a plus de mille centycles, afin de préserver ce monde, j’ai dû vous priver de vos pouvoirs. Aujourd’hui, la menace se réveille et je dois au plus vite vous rendre ce qui vous appartient. L’un de vos frères a déjà été pris au piège.

A ces mots, elle lâcha le cristal qui resta en lévitation et vint se poser délicatement sur le sol. Dans un geste solennel, Lucrécia leva les bras au ciel et sa robe commença à danser, comme agitée par un souffle de plus en plus intense. Ceux qu’elle appelait ses enfants étaient ébahis par la scène qui se déroulait sous leurs yeux. Le voile formait désormais une tornade blanche autour de la femme et la cachait totalement aux yeux des quatre spectateurs immobiles.

Alors que la tempête de lumière se déchainait, une puissante lumière commença à rayonner des cristaux qui reposaient à leurs pieds. Les couleurs qu’ils renfermaient s’agitaient de plus en plus et un filet multicolore s’échappa de chacun d’entre eux. Tels quatre reptiles serpentant dans les airs, les filaments de lumière se dirigèrent vers le cristal qui les attendait sous le tourbillon blanc. Arrivés à son contact, ils y pénétrèrent et la pierre sembla prendre vie, comme si un sang nouveau circulait en son sein. Les couleurs se mélangeant dans leur réceptacle, le flux de lumière suivit son cours et remplit quatre des cristaux qui pointaient chacun sur l’un des membres présents. Le cinquième appendice fut le seul endroit qui resta vide et terne. S’extirpant de leur tour de verre, les filets réapparurent à l’air libre pour reprendre leur route. Cette fois-ci, ils glissaient sans faire de détour. Leur nouvelle destination était les enfants de Lucrécia. Incapable de faire le moindre mouvement, comme retenus par une force invisible, ils ne purent que regarder cette étrange procession se diriger directement vers leur poitrine.

Une surprenante sensation de fraicheur s’empara de Serge lorsque la lumière toucha son torse. Il se sentit empli d’une nouvelle force, comme si une seconde vie coulait dans ses veines. Mais cela ne dura qu’un bref instant et une douleur atroce lui déchira l’abdomen. Quelque chose en lui luttait, réagissait face à ce nouvel intrus qui cherchait à pénétrer dans son organisme. Ne pouvant toujours pas faire un geste, son visage se déforma en un abominable rictus. Tous ses muscles se contractèrent et ses paupières se fermèrent laissant apparaître de grandes rides aux coins des yeux. Les dents serrées, le jeune homme sentit quelque chose qui sortait de son corps, repoussant tout le flux qui cherchait à pénétrer en lui. Un cri strident retentit dans la caverne. Lorsque celui-ci s’estompa, malgré la souffrance qu’il endurait, le garçon pu entendre la voix de Lucrécia. Cette fois-ci, elle n’était pas calme et posée comme à son habitude mais visiblement affolée.

- Non, comment est-ce possible ! Elle est là ! Non, ce n’est pas… elle a réussi à… ! Hynn, elle est en toi, elle t’a contaminé, tu dois t’en débarrasser. Rendez-vous à Rosaria dans cinq fluances, je vous y rejoindrai. Vite !

Serge ne voyait rien à ce qu’il se passait, toujours figé, grimaçant de douleur. Soudain, la torture cessa aussi vite qu’elle était apparue. Il n’avait plus aucune sensation, que ce soit la souffrance qui l’avait pris si subitement ou la fraicheur revigorante qu’il avait ressentie juste avant, au contact du flux coloré. Ouvrant les yeux à nouveau, il ne vit qu’une infinie étendue blanche. Il était de retour dans cet univers immaculé qui l’avait transporté dans cette cave mystérieuse. Que lui était-il arrivé ? Tout ceci était complètement insensé. Et quelles étaient ces deux forces qui s’étaient battues à l’intérieur de son corps ? Ses questions hantaient toujours son esprit lorsqu’il retrouva un lieu familier.

La sphère de lumière disparaissait tandis que le garçon reconnaissait les murs de sa chambre. Tout était là, les posters d’animaux sauvages collés aux murs, la moquette lui caressant la plante des pieds. Sur son bureau était posée une photo de famille. Son père, une main posée sur l’épaule de Serge, l’autre bras autour de la taille de sa mère. Elle, son merveilleux sourire accroché à son visage, passant son bras autour de Xavier. Xavier… A sa vue, le jeune homme se précipita dans le couloir et ouvrit précipitamment la porte de la chambre de son frère. Sous le drap blanc reposait le jeune garçon. S’agenouillant au bord du lit, Serge lui prit la main et posa la tête sur le matelas.

- Que nous arrive-t-il frérot ? Est-ce que tu comprends quelque chose à tout ça toi ?

Serrant la petite main de plus en plus fort, une larme coula sur sa joue. Relevant la tête brusquement, la fine goutte s’arracha à son visage pour finir sa course sur le bras de Xavier.

- Réveille-toi ! cria-t-il dans un excès de détresse.

Les nuances se succédèrent dans le silence le plus total. Dans la pénombre de la chambre, aucun son n’osa venir perturber le recueillement du grand frère.

Dans les rues d’Altéa, le mal était prêt à surgir, entrainant avec lui un pouvoir inconnu.

dimanche 3 août 2008

Chapitre 1 - Partie 4

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Chapitre 1 : La femme au Cristal
Partie 4


Etait-il devenu aveugle ? Serge se posa la question quelques secondes avant de réaliser que les aveugles ne pouvaient probablement pas voir leur propre corps. Mais il avait beau tourner son regard dans tous les sens, impossible d’apercevoir la moindre silhouette ni le moindre objet aux alentours. Tournant la tête de droite à gauche, le garçon voulu se retourner afin de chercher l’existence de quoi que ce soit qui puisse lui servir de repère dans cet univers immaculé. Mais c’est à cet instant qu’il s’aperçut qu’il ne sentait rien sous ses pieds nus. Aucun contact, aucune chaleur. D’ailleurs, l’intégralité de son corps était plongée dans le même état. Il lui était impossible de dire s’il avait chaud ou froid. Il était bien, tout simplement. Pas la moindre brise ne venait caresser sa peau et aucun son ne parvenait à ses oreilles. Il commença à se demander si ce n’était pas tous ses sens qui lui faisaient défauts. Il leva sa main devant ses yeux, l’observa quelques secondes puis la déposa sur son bras gauche. La chaleur de ses doigts sur sa chair lui laissa échapper un léger soupir de soulagement. C’est alors qu’il prit conscience des battements de son cœur dont les palpitements de plus en plus intenses résonnaient en lui et il se sentit alors étrangement oppressé. Pourtant son calme revint rapidement car il se sentait en sécurité dans cet endroit ou la douleur ne semblait exister.

Il chercha à nouveau à se déplacer mais il se rendit vite compte que cela lui était impossible. Comment marcher lorsqu’aucune surface ne se présente devant soi ? Cela n’avait pas de sens. Perdu au milieu de nulle part, ne pouvant pas faire le moindre pas, Serge ne pouvait que laisser son regard se perdre à l’infini.
Il n’avait aucune idée du temps qui s’était écoulé – la notion de temps avait-elle un quelconque sens en ces lieux vides de toute couleur – lorsque face à lui apparut un petit point noir. Celui-ci semblait très éloigné, bien que rien autour de lui ne lui permette d’en estimer la distance. Seulement, ce point grossissait comme s’il se rapprochait. Peu à peu, le point s’étirait et le garçon cru discerner une silhouette humaine. Mais il n’eut pas le temps de l’observer plus longtemps.

En un instant, le jeune homme se retrouva dans un endroit sombre. La petite sphère de lumière qu’il avait vu dans sa chambre et qui l’avait propulsé dans cet univers insolite flottait devant ses yeux. Celle-ci rétrécissait rapidement et un centième de nuance plus tard, elle avait totalement disparu. Où était-il encore arrivé ? Il mit un petit moment à reprendre ses esprits, puis il entreprit une observation minutieuse de son nouvel environnement.

Serge balaya du regard le nouveau décor qui l’entourait. Des murs de pierre, ou plutôt de la roche brute, taillée grossièrement, formaient une enceinte tout autour de lui. Relevant la tête, il vit que ces murs devaient monter à environ trois mètres de hauteur avant de former une voûte constitué de la même roche. Une lumière vacillante éclairait les murs de la salle dans laquelle il se trouvait. Continuant à détailler la grotte avec attention, il abaissa le regard sur le sol. Celui-ci était plutôt lisse si on le comparait aux autres surfaces de la pièce. D’ailleurs, le garçon commençait à sentir la froideur de la pierre sous ses pieds toujours nus. Il souleva une jambe. Serge ferma les yeux tout en prenant une profonde inspiration suivie d’un grand soupir de soulagement. Il pouvait bouger et son corps ressentait à nouveau la chaleur. L’atmosphère était chargée d’une faible humidité qui venait rafraichir sa peau. Après avoir reposé son pied à terre, il fit quelques pas sur place pour s’assurer d’être vraiment libre de ses mouvements. Se lançant à nouveau dans la contemplation de la salle dans laquelle il se trouvait, son regard s’arrêta sur une petite pierre qui dépassait du sol, juste à ses pieds.

Celle-ci était prise dans la roche, mais ce n’est pas ce qui retint en premier son attention. En effet, cette pierre émettait une lumière semblable au flux à ceci près que plusieurs couleurs se mélangeaient simultanément. Au lieu de briller de la lueur violette caractéristique de la dernière fluance et annonçant l’approche du nouveau cycle, le bleu, le rouge, le jaune se côtoyaient au sein d’un cristal multicolore en perpétuel changement. C’est de celui-ci que s’échappaient les rayons de lumière blanche qui éclairaient les murs de la grotte.
Intrigué, Serge voulu se pencher pour l’observer de plus près, mais c’est à cet instant qu’un grand flash inonda la pièce. La milinuance suivante, un jeune homme d’une vingtaine de centycles lui faisait face.

Vêtu d’un vieux jeans délavé et troué au niveau des genoux, le nouveau venu portait ses longs cheveux blonds attachés dans le dos. Ceux-ci paraissaient très sales, à l’image de son T-shirt gris présentant un symbole étrange sur le torse et couvert de tâches sombres. Son visage fin allait de pair avec son grand corps élancé et peu athlétique. Il devait bien mesurer un mètre quatre vingt dix et dépassait Serge de près d’une tête. Ses yeux fixaient une petite lumière blanche devant lui qui disparut aussitôt, tout comme celle que Serge avait pu voir quelques instants auparavant. Le regard des deux jeunes garçons se croisa alors dans l’incompréhension la plus totale. Qu’est ce que tout cela pouvait bien vouloir dire ? Imitant les gestes que Serge avait faits précédemment, le garçon aux cheveux blonds tourna la tête dans tous les sens pour découvrir les lieux. Lui aussi sembla soulagé lorsqu’il fit son premier pas. Pendant ce temps, Serge remarqua qu’aux pieds de son nouveau compagnon d’infortune reposait la même pierre que celle qui avait précédemment attiré son attention. Les mêmes couleurs se mélangeaient dans ce cristal aux propriétés inconnues. En voyant Serge fixer le sol avec tant d’insistance, l’autre garçon regarda à son tour le cristal et sembla tout aussi surpris par cette découverte. Scrutant les alentours, Serge remarqua la présence de trois autres cristaux identiques aux premiers. En étudiant un peu plus attentivement leur disposition, il put se rendre compte que ces cinq pierres étaient disposés de façon à former un pentagone régulier qui pouvait être inscrit dans un cercle parfait.

Flash ! Dans un éclat qui lui devenait familier, Serge vit apparaître une jeune fille accompagnée de la même petite sphère lumineuse qui disparut comme elle l’avait déjà fait les deux fois précédentes. Celle-ci ne portait sur elle qu’une légère chemise de paluance en soie bleue marine qui lui tombait à mi-cuisse, laissant entrevoir le galbe de ses jambes. Ses cheveux blonds légèrement ondulés lui tombaient sur les épaules et cascadaient jusqu’à sa poitrine. Une douceur incroyable émanait de la jeune fille qui venait de les rejoindre, renforcée par la faible lueur que dégageait le cristal qu’elle avait elle aussi à ses pieds. Serge avait rarement vu une fille d’une telle beauté et les ombres que ses formes dessinaient sur sa peau ne la rendaient que plus radieuse à ses yeux. Au vu de son air hébété, elle semblait tout aussi déconcertée que les deux garçons qui la dévisageaient et entreprit à son tour de comprendre où elle se trouvait.

Flash ! Un troisième individu venait de surgir dans un nouvel éclair blanc. D’un âge plus avancé que les jeunes gens qui l’entouraient, l’homme était mal rasé et de constitution plutôt imposante. Debout devant un quatrième cristal, lui aussi semblait totalement perdu. Lorsque la petite sphère eut disparu, il remarqua qu’il n’était pas seul. Passant sa main dans ses courts cheveux bruns, il les observa les uns après les autres avant de s’intéresser aux murs de pierre de la grotte.

Cinq cristaux. Quatre personnes. Serge se tourna vers le cinquième cristal se trouvant directement à sa gauche, attendant une nouvelle apparition. Il ne comprenait toujours pas ce qu’il se passait ici, mais la logique voulait qu’un autre inconnu fasse très vite surface à côté du dernier cristal. Cependant, son raisonnement fut vite contredit.

Au centre du cercle, quelque chose commençait à bouger, comme si l’air s’agitait. Puis lentement, des petits filets de lumière tourbillonnants se laissèrent deviner. Serpentant à deux mètres au-dessus du sol, s’emmêlant les uns les autres, les filaments gagnèrent en intensité et s’épaissirent, jusqu’à former un gigantesque nœud de lumière blanche dominant les quatre spectateurs complètement fascinés par ce phénomène extraordinaire. Puis, s’échappant de ce méandre surnaturel, une voix s’adressa à eux.

- Vous voilà enfin réunis, mes enfants…