lundi 29 septembre 2008

Chapitre 3 - Partie 2

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Chapitre 3 : Le départ
Partie 2


S’échappant d’une épaisse chevelure blanche, deux grandes oreilles se dressaient de chaque côté de son visage. Très longues et grandes ouvertes, elles ressemblaient fortement à celles que pouvaient arborer les lapins géants, espèce rare que Serge avait pu découvrir dans l’une de ses lectures. Chacune d’elles étaient couvertes d’une fine fourrure ivoire tachetée d’ébène à leur extrémité. Son visage fin et légèrement bronzé avait tout de l’être humain si ce n’était un petit nez retroussé qui se remarquait à peine tant il s’intégrait parfaitement à son profil épuré. Le reste de son corps était caché par une longue robe blanche faite dans un tissu très épais qui semblait mal approprié à la température qui régnait à Altéa en cette première fluance du cycle. Des coutures rouges cerclaient son cou, descendaient le long des bras et des jambes et marquaient le contour des manches. Une fois l’étrange demoiselle debout, le bas de la robe devait lui recouvrir les pieds mais dans sa position actuelle, complètement recroquevillée contre le mur, on pouvait deviner ses longues jambes élancées et les chaussures blanches qu’elle portait. Tout cet accoutrement ne ressemblait en rien à la mode actuelle d’Ivalice et Serge n’avait jamais vu de tels vêtements, bien que l’armure qu’il avait eu sur le dos peu de temps auparavant ne fût pas non plus tout à fait d’actualité.

Cherchant à se faire la plus petite possible, la femme – si l’on peut l’appeler ainsi – serrait ses genoux contre son corps tout en les entourant de ses bras. Ses mains posées sur ses mollets dévoilaient des doigts très allongés qui se terminaient par de longs ongles acérés, comme des griffes. Cherchant de l’aide parmi tout ce monde qui l’effrayait, ses yeux défilaient sur la foule mais n’accrochaient aucun regard. En l’observant plus attentivement, on pouvait la voir trembler légèrement, comme un animal acculé dans une impasse, cerné par une horde de chasseurs. Les cris continuaient de s’élever tout autour d’eux, condamnant la "créature", la comparant aux monstres qui avaient attaqué la ville et semé la terreur dans l’esprit des habitants. Jusqu’à présent, personne n’avait osé l’approcher à plus de cinq mètres, mais les gens s’agitaient de plus en plus et certains d’entre eux devenaient véritablement agressifs. Les quelques personnes qui avaient essayé de défendre l’étrangère n’avaient pas réussi à se faire entendre et étaient maintenant dépassées par la violence qui s’opposait à eux.

- Non, je ne resterai pas ici plus longtemps sans rien faire ! Si personne ne veut s’en charger, je le ferai !
Une voix d’homme, puissante et emplie de rage, venait de se détacher du brouhaha ambiant. Accompagnant ces mots, une silhouette se détacha de la foule et s’avança vers la victime affolée. Ce corps n’était pas particulièrement athlétique, mais sa détermination était bien plus effrayante que des muscles bien placés. Une haine sordide défigurait l’homme qui venait de s’avancer.
- Tu fais parti de ces saloperies qui ont dévoré ma femme, hein ! C’est même toi qui les a amenées ici, n’est-ce pas ! Tu vas payer pour ce que tu as fait, pourriture !
Joignant les gestes à la parole, il s’élança vers elle.

Dans le court instant qui suivit, un éclat blanc fit apparaître un bâton de bois sculpté dans la main de la femme. Enfouissant sa tête dans ses genoux, elle le leva au dessus d’elle et une sphère cristalline aux facettes innombrables l’entoura. Presque instantanément, la bulle étincelante explosa dans une multitude de petits cristaux qui disparurent aussitôt. Stoppé net dans sa course, l’homme se figea, son expression reflétant la plus profonde incompréhension. Puis, la première surprise passée, la colère reprit le dessus, renforcée par ce nouveau phénomène qui avait rendu sa victime encore plus monstrueuse à ses yeux. Il se jeta sur elle et lui saisit un bras qu’il tira violemment. Sans présenter la moindre résistance, elle se retrouva étalée au sol, à la merci des attaques de son assaillant. Il commença alors à lui assener des coups de pieds acharnés dans les côtes et dans la tête qui s’écorcha sous les chocs. Un sang épais dégoulina de sa bouche et forma une flaque écarlate sur le sol de pierre. Les joues égratignées commencèrent elles aussi à saigner abondamment et des cris de douleurs retentirent dans les rues d’Altéa.

- Arrêtez !

C’était la voix de Serge qui venait de s’imposer au milieu de cette horrible scène. Les coups cessèrent et l’homme se tourna vers celui qui venait de l’interrompre. Lorsqu’il le vit, il se crispa à nouveau.
- Mais qu’est-ce que… ?
Le garçon ne comprit pas tout de suite la réaction que l’homme eut en le voyant. Puis, en baissant le regard, il vit qu’il était à nouveau couvert de la même armure et que l’épée était de retour dans son poing serré. Laissant ses interrogations pour un moment plus opportun, il rangea son arme dans son fourreau, se précipita vers l’étrangère ensanglantée, la porta sur son épaule sans la moindre difficulté et reprit sa course. Face à la foule regroupée, il s’arrêta une fractance et s’aperçut que les gens s’écartaient pour lui laisser un passage, visiblement apeurés par les évènements qui se déroulaient sous leurs yeux. Il se tourna alors vers Christy qui n’avait pas bougé, toujours vêtue de ses habits de sport.
- Allez, on y va !
L’étudiante se ressaisit et courut aux côtés de Serge. Ils s’échappèrent du cercle qui s’ouvrait devant leur passage.

Ils ne s’arrêtèrent de courir que lorsqu’ils arrivèrent devant la maison du garçon. Il ouvrit la porte, fit entrer Christy et referma derrière elle. Il déposa ensuite la blessée sur le canapé du salon et se pencha sur elle.
- Vous allez bien ?
En entendant les mots de son sauveur, elle entrouvrit les yeux.
- M… Merci.
- Laissez-moi faire, je vais vous soigner.
Il se tourna vers Christy qui hocha la tête d’un air approbateur. Il posa alors ses mains sur les plaies du visage meurtri et ferma les yeux. Une lumière émana de ses paumes et vint recouvrir les joues profondément écorchées. Lorsqu’elle se dissipa, les entailles s’étaient légèrement refermées mais la guérison n’était pas aussi spectaculaire que pour le poignet de la jeune fille. Ouvrant plus grand les paupières, la femme reprit la parole.
- Un premier soin ne suffira pas à me guérir suffisamment, laisse-moi faire.
Brandissant son bâton entre elle et les deux jeunes gens, un grand flash blanc s’en échappa et son corps tout entier rayonna. Sous le regard ébahi des deux spectateurs, les plaies se refermèrent les unes après les autres. Même les tâches de sang séché disparurent. La lumière s’apaisa et la femme aux longues oreilles se redressa.
- Waow, c’est super ça ! laissa échapper Christy. Ton petit tour n’a plus aucune classe maintenant !
- Oui, mais c’est peut-être pas ce qu’il y a de plus important ! Qui êtes-vous ?
- Je m’appelle Elian, merci de m’avoir aidé. Et vous, comment vous appelez-vous ?
- Je m’appelle Serge.
- Moi, c’est Christy.
- Merci Serge. Merci Christy. Mais que se passe-t-il ? Qu’est-ce que je fais là ? Et pourquoi n’y a-t-il que des Humes ici ?
- Des quoi ? reprit l’étudiante.
- Des Humes ! Enfin, votre race quoi !
- Une race ? Vous voulez dire que vous êtes d’une autre race ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Je n’ai jamais entendu une telle chose !
- Bien sûr, je suis une Viera, ça se voit, non ?
- Une Viera ?
- Oui, mais vous n’avez jamais vu d’autres personnes de ma race ?
- Christy, intervint Serge, je crois qu’il y a encore pas mal de chose qui nous échappe pour l’instant, laisse-la nous expliquer tout ça s’il te plaît.
A peine eut-il fini sa phrase que son armure disparut et il se retrouva à nouveau en pyjama.
- Oui, et toi je crois que tu ferais mieux de te changer, gloussa la jeune fille, ca ne se fait pas de recevoir des jolies femmes comme nous dans des fringues pareils !